L’Hypocrisie morale

S’autoriser un plat gras en prenant une boisson light, effectuer un grand nombre de kilomètres après l’achat d’un véhicule moins énergivore, ou prendre des douches plus longues après l’installation d’un chauffe-eau plus efficace : Tout ceci sont des exemples d’un phénomène étudié en psychologie sociale et en marketing, qui se nomme L’Hypocrisie morale.

Ce concept décrit la susceptibilité accrue d’un individu à faire un choix immoral après avoir fait un choix moral. Le choix moral lui octroyant une sorte de « crédit » lui permettant d’ensuite faire un choix immoral.

Plusieurs études ont permis de mettre en évidence ce phénomène, Lucas Davis, économiste de l’énergie à l’Université de Californie à Berkeley, a publié une étude montrant qu’après avoir obtenu des lave-linges moins consommateurs en électricité, les personnes ont augmenté le lavage de près de 6 %. D’autres études montrent que les gens laissent les lumières écoénergétiques allumées plus longtemps. Une étude récente du Shelton Group, qui prône des choix de consommation durables, a montré que sur 500 personnes qui avaient verdi leurs maisons (via des travaux de rénovation), un tiers n’ont vu aucune réduction de factures.

Je ne saurais mieux dire !

Benoît Monin, psychologue social qui étudie la licence morale à l’université de Stanford, a déclaré :


« Nous avons ces négociations internes qui nous trottent dans la tête toute la journée, même si nous ne le savons pas ».

De ce fait, ce que démontre l’hypocrisie morale, c’est que le choix que nous faisons à un instant t, est influencé – sans en être conscient – des décisions passées.

La Loi de Koomey et le Théorème de Margolus-Levitin

Une loi empirique est une loi ou une formule issue de faits expérimentaux, ou validée par l’expérience, mais dont on ne connaît pas de base théorique, ou qu’on ne peut pas relier à une base théorique simple.

Ainsi, le second postulat de la première loi de Moore stipule que « le nombre de transistors des microprocesseurs sur une puce de silicium double tous les deux ans. » et se révéla particulièrement exacte entre 1971 et 2001.

En conséquence, les machines électroniques sont devenues de plus en plus petites et de moins en moins coûteuses tout en devenant de plus en plus rapides et puissantes.

En parallèle avec la loi de Moore, la loi (empirique) de Koomey décrit une tendance à long terme dans l’histoire des ordinateurs.
Elle peut être énoncée comme suit : la quantité d’énergie dont une machine a besoin pour effectuer un nombre donné de calculs va diminuer d’un facteur deux chaque année et demie.

Évolution du nombre de calculs effectués par kWh, de 1946 à 2009.
La courbe est le tracé représentant la loi de Koomey, en rouge, le nombre de calculs effectifs (d’où la régression linéaire).
  • Avec un raisonnement simple et en suivant cette loi, on peut imaginer qu’en fixant une quantité d’énergie (disons 1 joule), le nombre de calculs qu’une machine peut effectuer, va augmenter chaque année et demie.
  • Plus le temps passe, plus ce nombre de calculs croît (ici de manière exponentielle) et sans limites finie.

D’un autre côté, le théorème de Margolus-Levitin, impose une limite fondamentale au calcul.
Selon ce théorème, la vitesse à laquelle toute machine calcule (c’est-à-dire nombre d’opérations effectuées dans un temps donné et utilisant une quantité d’énergie donnée) ne peut pas être supérieur à 6 × 10^33 opérations par seconde et par joule.

Dit autrement, en utilisant un joule il serait possible à une machine de réaliser jusqu’à 6 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 (6 millions de milliards de milliards de milliards) d’opérations par seconde, mais sans pouvoir franchir cette limite.

Cette limite est surtout « physique », elle a été calculée par Norman Margolus et Lev B. Levitin, en effet, calculer revient à modifier l’état physique d’un bit d’information. Cette modification a un coût qui peut être borné, ce qui aboutit à la limite mentionnée plus haut.

De quoi bien faire attention aux abus de langages entre une loi empirique et une loi physique !

Le Postulat de Khazzoom-Brookes

L’effet rebond (dont le cas extrême est le paradoxe de Jevons) peut être défini comme « l’augmentation de consommation liée à la réduction des limites suite à l’utilisation d’une technologie, ces limites pouvant être monétaires, temporelles, sociales, physiques, liées à l’effort, au danger, à l’organisation… ».

Il en découle que : les économies d’énergie ou de ressources initialement prévues par l’utilisation d’une nouvelle technologie sont partiellement ou complètement (Jevons) compensées à la suite d’une adaptation du comportement de la société.

Le postulat de Khazzoom-Brookes (du nom des économistes Daniel Khazzoom et Leonard Brookes) est une théorie économique selon laquelle une meilleure efficacité énergétique tend paradoxalement à augmenter la consommation d’énergie.
Elle reprend et actualise le paradoxe de Jevons et est un exemple de l’effet rebond.

En effet, les économistes considèrent que l’augmentation des coûts de l’énergie (à cause de taxes supplémentaires, de pénuries, etc.) réduit sur le court terme l’utilisation de l’énergie, mais favorise, sur le long terme, une meilleure efficacité énergétique (via l’innovation).

Le HPC suit le postulat de Khazzoom-Brookes (From Bits to Buildings:
Energy Efficiency and the Path to Exaflops
)

Ils concluent que « cette réponse en efficacité compense partiellement l’augmentation des prix et donc la réduction de la demande est affaiblie. Le résultat final est un nouvel équilibre entre l’offre et la demande à un niveau plus élevé de l’approvisionnement et de la consommation que s’il n’y avait pas eu de réponse en efficacité. »

Ainsi, les voitures utilisant moins de carburant pourraient provoquer une augmentation correspondante du nombre de voitures, des trajets et d’activités liées aux voyages plutôt qu’une baisse de la demande en énergie. Il apparaît que ces multiplicateurs latents d’effets opposés seraient généralement plus grands que le résultat linéaire de l’effet original.

Le même raisonnement peut être appliqué pour les voitures moins polluantes, qui in fine, en raison de l’augmentation du nombre de voitures, polluent plus que la situation initiale.